L’Appel du 18 juin 1940

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  • Seconde Guerre mondiale (1939-1945)

Publié / modifié le : 13/06/2025

Londres, 18 juin 1940. Sur les ondes de la BBC, le général de Gaulle appelle à refuser l’armistice et à continuer la lutte contre l’occupant nazi. Quoique peu entendu le jour même, l’Appel du 18 juin marque le point de départ symbolique et politique de la France libre.

L’Appel

 

« L’espérance doit-elle disparaître ? La défaite est-elle définitive ? Non ! »

général de Gaulle

Après huit mois de « drôle de guerre », malgré quelques victoires françaises, l’invasion allemande ne peut être stoppée : le 14 juin 1940, les troupes allemandes entrent dans Paris alors que le gouvernement se replie à Bordeaux. 
Nommé sous-secrétaire d’État à la Défense nationale et à la Guerre le 5 juin, Charles de Gaulle a participé à d’intenses efforts diplomatiques pour maintenir la France dans la guerre, notamment en Afrique du Nord. Envoyé à Londres le 9 juin, il y retourne le 16 pour discuter d’un projet d’union franco-britannique, fusion politique et militaire des deux pays pour empêcher la capitulation française. Il n’est donc pas un inconnu pour Churchill quand, le 17 juin, de retour à Londres, il sollicite la possibilité de s’exprimer à la BBC, alors que la demande d’armistice par Pétain vient d’être diffusée à la radio française. 
 

Illustration par John Nash de l’Appel du 18 juin, parue dans l’opuscule de propagande General de Gaulle leader of the Fighting French, [1942-1943] Archives nationales, AE/II/3188 ©DR

L’Appel, dont l’enregistrement n’a pas été conservé, est diffusé le soir du 18 juin 1940 à 22 heures, heure anglaise. Charles de Gaulle, analysant la situation militaire française à long terme et dans la perspective d'une guerre mondiale, expose les raisons d'espérer la victoire finale envers et contre tout. Il invite les militaires français, ainsi que les ingénieurs et ouvriers des industries d'armement qui se trouveraient en Grande-Bretagne, à se mettre en rapport avec lui afin de continuer le combat aux côtés des alliés britanniques.

Manuscrit autographe de l’Appel du 18 juin 1940. Archives nationales, AE/I/25/9 [AG/3(1)/290]
Manuscrit autographe de l’Appel du 18 juin 1940. Archives nationales, AE/I/25/9 [AG/3(1)/290]
Manuscrit autographe de l’Appel du 18 juin 1940. Archives nationales, AE/I/25/9 [AG/3(1)/290]
Manuscrit autographe de l’Appel du 18 juin 1940. Archives nationales, AE/I/25/9 [AG/3(1)/290]

D’autres interventions à la radio anglaise suivent. Cela constitue aux yeux de la justice militaire française des actes de trahison et de désertion, justifiant ainsi une condamnation à mort, à la dégradation militaire et à la confiscation des biens par le tribunal militaire de Clermont-Ferrand début août. Mais son engagement pour poursuivre la lutte contre l’Allemagne vaut à Charles de Gaulle d’être reconnu officiellement par le gouvernement britannique comme chef des Français libres le 28 juin. 

L’engagement

« Je convie tous les Français où qu’ils se trouvent à s’unir à moi… »

général de Gaulle

L’allocution radiophonique du 18 juin est relativement peu entendue et n’est que peu relayée par la presse française. Quelques titres la retranscrivent, mais la majorité des journaux restent silencieux ou se contentent de publier le communiqué du ministère de l’Intérieur affirmant que le général de Gaulle ne porte aucune parole officielle. 
Dès le 22 juin, le général de Gaulle reprend la parole à la BBC, appelant de nouveau les Français à refuser l’armistice et à le rejoindre. Les premiers engagés rallient la France Libre par des moyens de fortune, notamment par la mer – comme les hommes de l’île de Sein – ou par les airs. Dès le 27 juin, de Gaulle signale à Churchill la présence de 75 officiers et 146 hommes âgés de 17 à 22 ans. 
 

Témoignage de Joseph Monjaret sur son engagement au service de la France Libre, 1946 Archives nationales, 72AJ/55
Témoignage de Joseph Monjaret sur son engagement au service de la France Libre, 1946 Archives nationales, 72AJ/55

Plusieurs figures célèbres sont à ses côtés dès les premiers jours, comme Maurice Schumann, parti pour l’Angleterre dès le 21 juin, ou René Cassin, le 24 juin. 

Carte postale du défilé des hommes de la 14e demi-brigade de marche de la Légion étrangère le 14 juillet 1940 (photographie prise par le service cinématographique de la France Libre) Archives nationales, 78AJ/26

Une proclamation du général de Gaulle est placardée sur les murs de Londres au début du mois d'août 1940. Face au gouvernement du maréchal Pétain qui a consacré la défaite de la France en signant l'armistice, puis remplacé la IIIe République par un « État français » bientôt engagé dans la collaboration avec l'occupant, de Gaulle jette les bases de la France libre, qui entend rallier tous ceux qui refusent la défaite et veulent résister aux Allemands. Ce nouvel appel prend l'allure d'une affiche de mobilisation générale afin d'affirmer le caractère officiel de la France libre ; il se fonde sur les mêmes arguments stratégiques que le précédent, à savoir l'idée que la France a perdu une bataille, mais non pas la guerre, et que celle-ci est une nouvelle guerre mondiale.

Affiche "À tous les Français" , [juillet 1940] Archives nationales, CP/72AJ/1436

En juillet 1940, une première brigade de la Légion française est créée. Fin août 1940, la France Libre compte déjà 3 200 hommes dans la Marine, environ 2 000 dans l’armée de terre et 300 dans l’armée de l’air. Rapidement, des comités de la France Libre se forment sur les cinq continents : 56 comités et 334 comités locaux participent ainsi à la propagande pour soutenir et fédérer les engagements.

Télégramme du 29 juin 1940 portant ralliement des anciens combattants du Guatemala Archives nationales, 72AJ/224
Télégramme du 29 juin 1940 portant ralliement des anciens combattants du Guatemala Archives nationales, 72AJ/224

L’engagement s’enracine aussi dans le territoire national : la Résistance intérieure se structure progressivement, rassemblant diverses tendances politiques qui acceptent finalement une unification en mai 1943, sous l’impulsion de Jean Moulin, au sein du Conseil national de la Résistance. 

Un idéal

« Quoi qu’il arrive, la flamme de la résistance française ne doit pas s’éteindre et ne s’éteindra pas. »

général de Gaulle

La France Libre s’appuie sur une symbolique forte : la croix de Lorraine qui, dès juillet 1940, devient un emblème fédérateur. Dans le même esprit, l’ordre de la Libération est créé en novembre pour honorer ceux qui s’engagent pour chasser l’occupant de France. Les émissions radiophoniques sur la BBC et la diffusion de matériel de propagande permettent d’entrer dans les foyers et de renforcer l’adhésion à la cause de la France Libre. 
La plaquette 18 juin 1940 - 18 juin 1941. La France Libre par l’image, publiée à la fin de 1941, met ainsi à l’honneur le premier anniversaire de l’Appel du 18 juin, soulignant la détermination de la lutte contre les nazis. Tout au long de la guerre, les commémorations du 18 juin rappellent le refus de la défaite, rendent hommage aux morts et saluent le courage des résistants qui risquent leur vie pour la liberté. Ainsi le 18 juin 1942, le général de Gaulle prononce un discours dans le cadre solennel de l'Albert Hall, plus grande salle de concert de Londres, à l'occasion du deuxième anniversaire de la France libre. Autant l'appel de 1940 était concis, autant ce discours est tout en ampleur, classique dans son écriture, émaillé de figures rhétoriques et de citations. Dressé à l'aurore de l'été 1942, « plus bel été de la France libre » selon Jean-Louis Crémieux-Brilhac, c'est un bilan empreint de fierté et d'émotion : l'entrée en guerre des États-Unis, le rapprochement avec les Alliés de l'Union soviétique, enfin la victoire des Forces françaises libres sur les armées de l'Axe à Bir-Hakeim, le 7 juin précédent, sont autant d'événements qui confortent le Général dans les certitudes qui sont siennes depuis 1940, lui donnant manifestement raison contre les tenants du régime de Vichy.
 

Discours du général de Gaulle à l'Albert Hall à l'occasion du deuxième anniversaire de la France libre, le 18 juin 1942, Archives nationales, AG/3(1)/373

Après la guerre, le 18 juin demeure une date hautement symbolique, même si le général de Gaulle se refuse à être « l’homme d’une seule date ». Vingt ans après 1940, c’est ce jour qui est choisi pour l’inauguration du Mémorial de la France combattante, édifié au mont Valérien. Enfin, par un décret de 2006, le 18 juin devient « journée nationale commémorative », signe que la portée de « l’appel historique du général de Gaulle à refuser la défaite et à poursuivre le combat contre l’ennemi » reste profondément significative pour notre société. 

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